La fin de l'automne avait apporté sa bise légère, m'embrassant à pleines joues. Mes pommettes blanches avaient rougi sous le froid sans être inconfortable. J'avais été habitué à de plus rudes températures.
Les saisons dans le Michigan était bien différente et, je ne pouvais m'empêcher de comparer le gel mordant de Bloomfield Hills à l'humide climat de Starfish en cette fin d’année.

Je laissais mes pensées vagabonder au gré des vagues, admirant les écumes blanches s'écraser sur les structures de verre et de métal en contre-bas. La mer avait des teintes argentées sous ces nuages mornes d'un orage qui refusait de s'abattre sur la côte. Il était aisé d'imaginer les foules de passants et autres badauds se pressant sur la Promenade Azur mais, le mois de Novembre les avait fait tous s'évader sous d'autres soleils. Je n'aurais guère trouvé meilleure occasion pour profiter de l'air marin en toute tranquillité avant les premières neiges.

Je me demande ce que tu aurais apprécié être à ma place. C’était toi qui avait rêvé de vivre dans cette ville.

Mon attention était si concentrée sur le paysage qui s'offrait à moi que je ne les vis s’approcher... D’ailleurs, je les sentis avant même de les remarquer. Le parfum de nicotine et de gel de supermarché me fit grimacer et, je remontais sans attendre le col de mon trench coat avec la naïve intention de dissimuler mon visage. Je m'apprêtais à partir quand, malheureusement, l’une des trois figures me barra la route. Mes yeux se plissèrent, devenant deux fentes écarlates tandis que je forçais un sourire chaleureux rempli de crocs. J'appréciais les fans mais, je n'avais plus la tête à cela...

Vous avez besoin de quelque chose, jeune homme ?

Le plus proche des adolescents passa une main dans ses cheveux bruns coupés en brosse. Un rictus était placardé sur son visage trahissant son amusement. Il roucoula d'une manière suave et, me toisa. Ses yeux étaient multicolores comme un magnifique kaléidoscope hypnotisant.  


Sa certitude me prit au dépourvu. Sans mentionner la familiarité de la déclaration… Je ne laissais toutefois pas impressionné et, j'approuvais du chef.

En effet mais, j'ai déjà expliqué à plusieurs reprises dans la presse que j'avais changé d'activité. C'est une décision très soudaine mais, je vous prie de la respecter. Si cela peut vous faire plaisir, je peux vous faire un autographe.

La jeune fille derrière moi éclata de rire. Ses longs cheveux blonds volèrent un instant dans les embruns. Elle aurait été ravissante si elle ne portait pas autant de maquillage : on aurait dit qu'elle s'était barbouillée de fond de teint, et je ne pouvais m'empêcher d'avoir froid pour elle... Il était vrai que les manières de se vêtir étaient multiples mais, j'espérais que Birdie ne portait pas de collants aussi fin avec un short et un débardeur à cette période de l'année !
Puis, le jeune homme aux yeux colorés sorti une de ses mains de son jean pour me pointer du pouce et, cria à l’adresse de ses amis :  


Son poing me cueillit à la mâchoire. La douleur m’aveugla et, je me rattrapais à la barrière en métal pour ne pas tomber. J’eus à peine le temps de reprendre mes esprits qu’un genou me heurta de plein fouet. Mes poumons se vidèrent sous le choc. Les adolescents me criaient des obscénités mais, mon esprit était englué dans du coton. Leur voix se mélangeaient aux rires des mouettes. Un nouveau coup me frappa au visage. Puis, ils s’y mirent tous les trois en concert. Ma silhouette se recroquevilla dans la vaine tentation de me protéger. Ils m'appelèrent un monstre. Ils voulaient que je pleure, que je souffre, que je meurs.
Je fermais les yeux. Le voile de torpeur se changea en manteau de souffrance.

Soudain, je réalisais. Ils n’allaient pas s'arrêter.

Quelqu’un m’attrapa par une corne et, tira. Un cri de douleur me fut arracher et, mes mains attrapèrent le poignet de mon agresseur et, pour la première fois depuis le début des festivités, je répliquais.


Je bondis et, pris la poudre d’escampette. Je courrais comme je ne l’avais jamais fait ! Mon cœur battait plus rapidement que les ailes d’un oiseau en cage. L’adrénaline et la peur étaient mes seuls carburants. Je ne savais où aller et, un instant, je crûs qu’ils me laisseraient en paix et, stupidement, je ralentis. Une cacophonie de voix et, le bruit de course qui suivit me fit rapidement déchanter. Sans attendre, je me précipitais dans l’obscurité de la cage d’escaliers. Mes doigts composèrent le numéro d’urgence.

Je me suis fait agresser par trois mineurs. J’ai réussi à m’enfuir mais, ils sont après moi ! Je ne connais pas leurs alters Je suis dans l’Hydranneau près de la sortie de la promenade. J’ai besoin d’aide !
…Steven Brown.

J’avais presque murmuré mon identité avec regret. Je ne voulais pas faire de vague dans cette nouvelle ville mais, Dieu en avait décidé autrement. Je hochais la tête avant de me rendre compte que la personne à l’autre bout du fil ne pouvait pas m’entendre. J’allais répondre lorsqu’un faux mouvement me fit trébucher. Je lâchais mon portable qui glissa hors de portée.

Bordel de merde.

Les bruits course se rapprochaient. Paniqué, je me redressais non sans difficulté. Chaque souffle était douloureux et, ma jambe gauche me lançait affreusement. Je savais que je n’allais pas réussir à aller loin ainsi… Alors priant, je collais à la paroi de l’aquarium juste derrière un pilier. Jamais auparavant je n’avais trouvé davantage à mon apparence gracile et ténébreuse mais, lorsque je vis passer devant moi le trio enragé, je pensais être l’homme le plus chanceux du monde.
Malheureusement, ils remarquèrent que je n’étais plus devant eux. Les bruits de course, devinrent des pas, avant de s’arrêter complètement. J’eus seulement le temps de me recroqueviller dans un recoin sombre avant que les souterrains ne furent plonger dans le silence….

Une voix retentit. Un appel moqueur déformé par l’écho de la galerie.
Je fermais les yeux, espérant que les secours arriveraient rapidement.