Étudier n’a jamais été le fort de Nancy. Elle n’y voyait rien de concret et se laissait distraire en dehors des cours d’histoire, où elle y puisait des enseignements et une inspiration. La dernière fois qu’elle avait posé le pied dans une école remontait déjà à plusieurs années, alors elle ne s’était pas attendue à fouler le sol de la Campbell Academy à Starfish. Après que son père l’ait acceptée en apprentie héros, rejoindre cette école pour héros était devenue une condition sinequanone. Polarity avait joué de sa réputation et de ses relations pour la faire intégrer une classe en cours d’année. L’alternance avait été un élément essentiel dans la balance. C’est ainsi, qu’elle s’était retrouvée à son premier cours pratique, entourée d’élèves d’âges et compétences variés dont elle ne connaissait rien.

- Bonjour à tous, nous accueillons à partir d’aujourd’hui Nancy dans notre école. Les regards se dirigèrent vers la nouvelle qui préféra les ignorer. Je compte sur vous pour lui faire bon accueil. D’un clic sur sa télécommande, un écran sortit du sol et présenta une série de diapositives. Aujourd’hui, nous allons simuler une prise d’otage. Ce sont des situations fréquentes qui demandent concentration et finesse pour être résolue. En tant que futurs héros, vous devez être capables de les gérer. Vous allez mettre en pratique ce que nous vous avons appris sur le terrain d’entraînement. La diapositive suivante afficha deux listes d’étudiants. Votre paire pour ce cours se trouve en face de votre nom. Rassemblez-vous rapidement, nous allons commencer.

Nancy fixa l’écran dubitative en regardant le nom de son partenaire : Mana. Avec un nom pareil, ça pouvait être n’importe qui. Elle n’avait encore aucune connaissance des capacités de chacun, ce qui aurait pu lui donner un indice sur la personne, alors elle espéra qu’elle vienne d’elle-même la voir. Sinon elle devrait attendre que les binômes soient formés pour découvrir qui il restait. La plupart ne mirent pas plus d’une minute pour se rassembler et rapidement sa binôme la trouva.

- Salut ! Toi c’est Mana ? C’est ton nom de héros ? J’ai pas encore trouvé le mien, alors appelle-moi Nancy.

Elles purent échanger quelques mots avant que leur professeur ne tape dans ses mains pour attirer l’attention.

- Bien. Nous allons maintenant passer à l’exercice, que le premier binôme se mette en place.

A ce moment-là, les visages de Mana et Nancy apparurent sur l’écran. La blonde pesta. Elle avait espéré avoir un peu de temps pour discuter avec sa partenaire pour faire connaissance et réfléchir à la manière de combiner leurs alters. Tant pis, elles devraient le voir directement sur le terrain. Pendant qu’elles marchaient pour aller se mettre en place, Nancy engoncée dans son armure tira son épée et s’excusa auprès de Mana… A sa façon.

- T’aurais préféré être avec quelqu’un d’autre que tu connais, j’parie. T’en fais pas, je vais pas te gêner.

Mana n’était pas le pseudonyme héroïque de la fille cornue. En faisant des raccourcis trop rapides, Nancy avait encore dit une boulette mais, heureusement, Mana ne semblait pas en être vexée. C’était même une fille plutôt joviale avec un visage qualifiable de mignon, malgré ses longues cornes sur le front. Nancy se demanda si cet aspect physique était en lien avec son alter, mais n’eut de toute façon pas le temps d’échanger plus longtemps avec Mana, que leur professeur les invitait d’ores et déjà à se mettre en place.

Contrairement à la blonde qui aurait aimé avoir une discussion approfondie avec sa camarade, la cornue paraissait prête à rejoindre le terrain sur le champ. A la voir agiter ses bras pour se préparer à en découdre, Nancy se dit que cette fille n’était sûrement pas uniquement mignonne. En retour, coincée dans une armure, la flamboyante n’avait accès qu’à un nombre limité de mouvements avec ses bras et ses jambes. La qualité de l’armure étant ce qu’elle était, cela ne l’aidait pas non plus à se mouvoir avec beaucoup d’aisance. Néanmoins, c’était suffisant avec son niveau de maîtrise actuel pour effectuer ses attaques principales.

En arrivant sur le terrain, une série de blocs de différentes hauteurs représentaient des bâtiments. Au centre de cette reconstitution se trouvait le bâtiment supposé de l’ennemi détenant l’otage. Du peu d’informations dont elles disposaient, le civil était retenu au bout d’une corde dans le vide. La moindre erreur pourrait lui être fatale. Mana prit les devants et ne passa par quatre chemins, le temps leur manquant. Au fond, Nancy avait nettement une préférence pour le combat avec le vilain. Cependant ce n’était qu’un mannequin, rendant tout affrontement moindre d’intérêt à ses yeux.

- J’peux pas voler. Mon truc, c’est les flammes. Je sais pas si ça t’inspire quelque chose, mais je suis prête à me soumettre à tes idées.

L’objectif de cette simulation était d’appréhender le bandit sans blesser l’otage. En y réfléchissant bien, la blonde remarqua que son alter ne serait d’aucune utilité pour l’otage. Au mieux, elle pourrait l’attraper dans ses bras avant qu’il ne touche terre, mais il pourrait se faire un coup du lapin. Sinon, elle pourrait se jeter du bâtiment d’en face, le chopper et user de son armure pour couvrir l’otage et subir entièrement l’impact du choc pour l’épargner. Enfin, une dernière possibilité serait d’user de son alter pour détruire des débris qui pourraient heurter l’otage.

- Je suis pas sûre d’être très adaptée au sauvetage, mon champ d’action est limité. Il fait quoi ton pouvoir en bref ?

Ce serait vraiment la poisse d’échouer à son premier exercice pratique. Nancy refusait que cela arrive. Si Mana n’était pas capable de faire ce qu’elle ne pouvait pas non plus, alors elles devraient peut-être user d’une autre méthode pour arracher l’otage à son geôlier. C’était tout sauf glorieux, mais ça avait une infime chance de marcher.

- Sinon on pourrait tenter de négocier pour gagner du temps et mettre en place une attaque avec sauvetage immédiat ?

Dans les faits, c’était tout sauf évident à réaliser. D’une part, les demoiselles ne savaient pas si le mannequin était équipé d’un micro pour permettre ce genre de dialogue. D’autre part, et c’était le plus important, comment arriveraient-elles à être assez rapides pour mettre hors d’état de nuire le criminel et le civil avant qu’il n’ait eu le temps de l’envoyer faire un plouf dans la mer de béton ?