Non, je n’ai pas regardé l’affaire plus en détail que ça, et je … écoute, prends-moi pour une vieille, mais si j’en avais quoi que ce soit à faire des réseaux sociaux, on ne serait pas en train d’avoir cette discussion au téléphone. Fais-moi un brief rapide de ce qui s’est passé, de pourquoi c’est important, et ensuites tu pourras élaborer sur pourquoi tu m’appelle.
- Bon. Timer. Un des criminels de l’effondrement. Ça te dit quelque chose ça ?
Dans l’idée.
- Hm. Ça fait depuis le blocus de new york qu’on a plus de nouvelles. Et là, son compte a envoyé trois messages à la suite, disant que la semaine prochaine il va ouvrir une brèche à New York.
Mh, cette partie-là les infos l’ont relayée. Ça peut pas être un faux, je suppose ?
- Non. Et il a parlé d’un nom qui me disait quelque chose, dans le genre … « légende urbaine ». Un peu comme toi, mais dans un style encore pire.

La petite tueuse se retint de faire une remarque désobligeante, et s’appuya contre le comptoir de sa cuisine. D’habitude, c’était elle qui contactait son informateur, lorsqu’elle avait besoin d’infos sur une mission … Le fait que ce soit lui qui initie la communication était inhabituel. Le seul problème était que la petite tueuse avait, d’un côté, envie qu’il aille droit au but … Mais de l’autre côté, elle n’avait pas forcément tout suivi à ce qui s’était passé sur Ukato ce midi, parce que ça ne l’intéressait pas du tout. Elle avait compris que la semaine prochaine, elle pourrait se rendre à New York, mais pour l’instant elle n’avait reçu aucune offre de contrat prenant avantage de cela … Enfin, ça allait peut-être changer. La voix brouillée à l’autre bout du fil reprit.

- Dans le sens où ce serait un type avec des objectifs un peu déments qui pourrait causer une chiée de problèmes, je veux dire. Et on sait pas jusqu’où il est prêt à aller. Toi, quand un mafieux t’envoie pas cramer la gueule à un de ses rivaux à coup de chalumeaux, tu te tiens relativement tranquille.
Viens-en aux faits.
- J’ai ouïe dire d’une clef USB, sur starfish, qui contiendrait des infos sur ce « big bang ». Et j’aurais besoin qu’on me la récupère.
Je suis pas vraiment une cambrioleuse, t’es au jus ?
- On dit « se tenir au jus », pas juste … Bref. Tu es efficace, tu es sur starfish, et si tu me rends ce service je dois probablement pouvoir te dégotter un contrat pour la semaine prochaine. Ce ne sera pas très difficile de toute façon.
La petite tueuse passa les bouts osseux de ses doigts sur ses paupières, les frottant avec un brin d’ennui. Elle avait prévu une soirée tranquille … enfin. Lorsqu’elle dévoila de nouveau ses pupilles écarlates, ces dernières cherchaient déjà sa combinaison de combat, qui devait être dans son placard. [color#220066]C’est une des pires phrases que je peux entendre dans le milieu. Elle est où, ta clef hiuèssby ?[/color]


Sur le papier, au final, ce n’était effectivement pas si compliqué que ça … Il fallait récupérer une valise renforcée, qui était en ce moment entre les mains d’un petit gang local de gangsters. Ces derniers étaient habituellement plus versés dans la vente de stupéfiants que dans la contrebande, mais leur patron leur avait intimé de livrer la valise le lendemain, sans poser de question et sans l’ouvrir. Du coup, pour l’instant, ladite valise – dont 95% du contenu servait d’ailleurs en réalité à couvrir la clef USB que la mercenaire devait récupérer – était dans une planque, l’arrière-boutique d’un restaurant chinois servant de façade. La démone combattante, elle, se trouvait sur le toit du bâtiment. Elle n’eut aucun mal à forcer la trappe d’accès au toit, même s’il allait probablement falloir faire quelques réparations sur la serrure par la suite … Glissant la tête par l’ouverture, elle soupira silencieusement. Normalement, de l’intérieur, on accédait à cette trappe à l’aide d’une échelle … qui était actuellement contre le mur dans la cage d’escalier. Totalement hors d’atteinte, donc. Se faufilant dans le trou, elle se laissa tomber au sol, deux mètres plus bas, et amortit sa chute du mieux qu’elle put. L’onde de choc fit trembler de la rambarde de l’escalier jusqu’aux fenêtres qu’elle pouvait voir face à elle, mais à en juger par le bruit, elle n’avait rien brisé. Une inspection visuelle confirma la chose, aussi ne s’attarda-t-elle pas plus et commença à dévaler les escaliers.

Le restaurant s’étalait sur le rez-de-chaussée et le premier étage : tout le reste de l’immeuble était constitué d’appartements. Par chance, la grande salle du premier étage était, d’une part, quasi vide à cette heure, et d’autre part, accessible depuis l’escalier principal via une porte de service. Glissant à moitié à 4 pattes entre les tables en évitant les deux ou trois individus présents dans la pièce, la petite mercenaire étudia quelques instants ses options. Descendre par l’escalier du restaurant pour ensuite rejoindre la cuisine ou la réserve semblait difficile, surtout qu’elle ne connaissait pas le bâtiment … Mais elle remarqua, dans un des murs du fond, un monte-charge sur lequel pouvaient vraisemblablement être déposés des plats assez larges et lourds. Avec un sourire, elle se dirigea vers cette chance inespérée, tout en gardant les deux trois personnes présentes à l’œil. Ouvrant le plus délicatement possible le petit volet métallique, elle se faufila dans l’ouverture en appuyant sur les parois pour se retenir. Descendant sans difficulté les quelques mètres qui la séparaient de l’étage du dessous, elle s’arrêta au-dessus du plateau sur lequel étaient normalement chargés les plats ou boissons qui devaient être montés à l’étage, s’appuyant toujours contre les parois du conduit. Glissant une griffe sous le volet, elle le fit remonter d’un ou deux centimètres à peine, de quoi poser sa tête contre le plateau et regarder … Une salle plongée dans l’obscurité, depuis laquelle on entendait à peine les bruits de la cuisine. Tirant le rideau métallique vers le haut, la petite tueuse s’extirpa du conduit en se laissant tomber à terre, et resta allongée là un instant, le temps de laisser le sang évacuer sa tête pour se rendre dans d’autres parties de son anatomie. Elle eut un bref moment de satisfaction, et se laissa aller à penser qu’au final, il y avait un côté amusant à ces histoire de cambriolage se déroulant sans heurt.

Un instant plus tard, elle se relevait, chassait ces niaiseries de son esprit et sortait une lampe torche de sa poche pour illuminer la salle. Comme elle s’y attendait, la réserve. Et derrière les tonnelets de bière de marque indéterminée et les sacs de nourriture non périssable, se trouvaient d’autres sacs plastiques transparents … Herbes séchées, blocs de matière résineuse sombre, poudre blanche, cristaux bleus. Un néophyte complet aurait deviné que les trois premières catégories d’objets n’étaient pas des herbes aromatiques, des cubes à bouillons ou de la farine. Continuant de balader la lueur pâle de sa torche partout dans la salle, elle finit par saisir du regard un reflet intéressant. Se rendant jusqu’à l’étagère, elle en tira avec une certaine satisfaction une mallette métallique, qui devait être assez bien remplie vu son poids. La déplaçant pour la mettre à son niveau, la mercenaire eut un instant de réflexion. Son informateur lui avait dit que la valise qu’elle cherchait avait un système pour détecter si elle avait été ouverte, invisible de l’extérieur bien entendu, mais qui transmettrait automatiquement un signal à la personne supposée la recevoir. Il lui avait aussi fait comprendre que la clef USB était dans un compartiment un peu caché, tandis que la valise était remplie de marchandise volée et précieuse. De quoi faire oublier l’existence d’une bête clef en gros, même si les petites frappes ouvraient le conteneur renforcé ou se le faisaient dérober. Le plan parfait aurait été de trouver un moyen d’ouvrir la valise sans déclencher l’alarme, de subtiliser la clef ou de la remplacer par une du même modèle (la petite tueuse en avait 4 différentes sur elles vu qu’elle ne connaissait pas la marque précise de ce qu’elle voulait) et de repartir sans être détecté. Son informateur l’avait d’ailleurs fait passer à une boutique du marché noir de sa connaissance, récupérer un brouilleur d’ondes capable d’empêcher l’alarme de causer le moindre problème. Seul souci : avant qu’elle n’ait eu le temps de le sortir de sa tenue, quelqu’un alluma la lumière.

… Qu’est-ce que … Qui êtes-vous ? Ne bougez pas ! E-et mettez vos mains en évidences !

Le type était habillé comme un serveur. Mais ça ne l’avait pas empêché de dégainer une arme de poing de sous sa chemise et de braquer la mercenaire avec. Cette dernière, vêtue presque entièrement de noir et ayant le visage masqué, se contenta de reculer d’un pas et d’observer stoïquement le jeune homme. La possibilité même de s’embêter à faire croire qu’elle n’était jamais venue était désormais impossible : une seconde personne portant un tablier rejoint la première dans l’encadrement de la porte, et il semblait y avoir de l’agitation dans le reste du restaurant. De toute évidence, elle allait devoir forcer le passage pour sortir … Saisissant la poignée de la valise et tirant d’un coup brusque, elle la fit tomber de l’étagère contre sa hanche, la tenant fermement. Le serveur trembla un peu, mais ne tira pas, un sourire venant étirer ses lèvres.

C’était ça que tu cherchais … M-manque de pot mon p’tit père, c’est à nous et ça va le rester.
Tu veux un mégaphone, pour mettre encore plus de gens au courant de ton manque d’assurance ?
Qu-quoi ?
« Qu-quoi ?!», imita la petite tueuse avec un ton volontairement plus niais que l’original, Tu es en train de me pointer avec un flingue et pourtant ma peur la plus profonde en te voyant, c’est que tu ne trembles trop et que tu ne tires sur un tonneau. J’ai pas envie d’empester la bière jusqu’à ce que je rentre chez moi.
Fais la fière autant que tu veux, t’es faite comme un rat petite. Le second serveur qui venait de parler la pointait également avec un revolver de petit calibre, et s’avançait de quelques pas, suivi par encore d’autres membres du personnel. Cette réserve n’a que la porte derrière nous comme issue, et on t’aura criblé de balles avant que tu n’aies fait un pas dans sa direction. Pour commencer, poses cette valise.
Dorogoy, j’en ai profondément rien à foutre de vos pétoires et je vais sortir d’ici. Que ce soit les poings propres, ou couverts de votre sang.

Un coup de feu unique retentit, suivi d’un second, et de quelques cris. Un des mafieux avait tiré, faisant paniquer son plus jeune collègue. Le premier tir avait atteint la mercenaire à la tête, qu’elle avait tourné sur le côté sous la force de l’impact. La seconde balle avait percé un tonneau de bière sous pression, et cette dernière laissait désormais échapper un jet fin mais puissant de liquide contre le mur d’en face, formant une sorte de nuage humide dans la petite pièce. La petite mercenaire tourna lentement la tête vers le groupe, le masque qu’elle portait voilant entièrement son visage et son expression. Mais le ton glacial de sa voix était suffisant à faire comprendre ses émotions.

Tu as choisi la mort, donc … Très bien.
Si vous pouviez cesser d’importuner mes hommes …

La voix grave qui retentit dans toute la réserve fit pivoter la moitié des mafieux, qui s’écartèrent pour laisser passer un homme aussi grand que large, dont la blouse tachée et le tablier indiquaient qu’il était visiblement le chef cuisinier du restaurant … Entres autres activités professionnelles. Deux petits verres circulaires de lunettes de soleil voilaient ses yeux, qu’on devinait pourtant minutieux. Le relief des os de sa mâchoire était noyé sous des excédents de peau, de gras, et de barbe d’une semaine très mal entretenue. Son large sourire révélait une dentition impeccable, encadré par des lèvres épaisses et légèrement gercées. Il avait les tempes grisonnantes, et des rides d’expression marquées, qui laissaient sous-entendre une quarantaine passée … Ainsi, vu l’état de sa peau, qu’une consommation peu modérée de nourriture et de substances pas forcément légales. Bref, c’était le mâle alpha de cette meute de blancs-becs, et l’effet de sa simple présence sur ses hommes n’était pas difficile à noter : ils se sentaient tous bien plus confiants. Faisant quelques pas pour s’approcher de la petite mercenaire, il pointa du doigt l’étagère à côté d’elle.

Ils vous ont demandé, il me semble, de remettre ceci où vous l’avez trouvé … Pourquoi ne pas permettre à cette journée d’avoir un heureux dénouement, en suivant cette directive ?
Parce que je veux ce qu’il y a dans cette valise, donc je vais partir avec. Et ça m’arrangerait de sortir d’ici sans avoir à tous vous changer en cadavre, mais je viens de me prendre du neuf millimètre dans le front. Donc j’imagine que juste « écartez-vous s’il-vous-plaît » ne marchera pas.

Le chef mafieux éclata d’un rire franc, avant de relever les poings. Son sourire carnassier donnait l’impression qu’il observait, dans sa tête du moins, un délicieux morceau de steak qu’il allait dévorer sans couverts. La mercenaire ne bougea pas d’un iota. Lorsqu’il se jeta sur elle, elle se contenta de se baisser, et de lui balancer un tonnelet de bière à la figure avec sa queue. De façon surprenante, il se baissa de façon très agile vu sa constitution massive, et se redressa en envoyant un uppercut puissant à l’ancienne russe, avant de bondir vers l’arrière. Pas de super force ou quoi que ce soit … Ceci dit, elle sentait comme un … Grésillement parcourir son corps.

Et maintenant, toujours pas d’avis à te rendre ?
[color:d6a8=##220066]Qu’est-ce qui a changé ?
Humf. Je pensais que les gens dotés d’alters passifs de résistance comme le tiens le sentait immédiatement … Lorsqu’ils redevenaient aussi vulnérables que n’importe qui.
La mercenaire haussa un sourcil sous son masque. Puis rétorqua d’une voix égale. Ah, c’était ça … Tu désactives l’alter au contact ?
Pour les deux ou trois dernières personnes que j’ai touché seulement, mais aussi longtemps que je le désire. Tu as toujours envie de rouler des mécaniques et de dire que tu « vas » sortir d’ici ?
Hm.

Un silence suivit. Puis, quatre mafieux durent se jeter à terre pour ne pas se trouver sur la trajectoire de leur patron. Un n’y parvint d’ailleurs pas, et le choc l’envoya valser contre un mur, brisant quelque chose au niveau de son épaule. Le patron, quant à lui, percuta la paroi face à la porte de la réserve avec tant de violence qu’il s’en brisa sans aucun doute un grand nombre d’os, et perdit connaissance avant même de toucher le sol. Difficile de dire s’il survivrait. La guerrière naine se redressa de la position qu’elle avait adoptée, et souffla une mèche de cheveux roux hors de son champ de vision.

Quelqu’un d’autre a envie de remettre en question l’idée que je vais sortir d’ici dans les minutes qui viennent, et ce peu importe ce que vous pourrez faire pour m’en empêcher ?

Il y eut peut-être 5, 10 secondes de silence dans la pièce. Puis, quelqu’un qui avait jeté un coup d’œil au « patron » ne fut plus capable de retenir son déjeuner et dû se tourner sur le côté pour vomir.


Ouais ouais, ça s’est passé quasi sans accroche. Bon, ils sont au courant que quelqu’un d’un mètre quarante a disparu avec leurs 25 kilos d’or, mais bon …
- Tu peux toujours leur rendre si t’as pas envie d’avoir des soucis avec les mafieux locaux. Ou le garder comme paiement, si ça te chante. Vu que tu as aussi dérobé la clef ceci dit, autant garder l’or, ça leur donnera l’impression que tu voulais juste leur faire perdre quelques millions … Tu as branché la clef dans ton PC portable ?
Ouais, ouais, deux minutes, j’arrive pas à trouver le bon sens pour la rentrer … Ah, voilà. Et donc là, je fais quoi ?
- Tu ouvres le programme que je t’ai envoyé, tu cliques sur okay, puis autoriser la demande de connexion … autoriser … Et … Voilà, j’ai le contrôle de l’ordi.
Si tu prends le contrôle de la webcam, je ne tiens pas à parler de pourquoi j’ai une poche de glace accrochée à la corne. La petite tueuse grimaça légèrement, et leva une main pour mieux caler son téléphone entre le bout de sa queue et son oreille. Saches juste que c’est de ta faute.
- Je … Ne comptais pas te poser de question. Donc, répertoire E:\ … Vide ? Pff, les petits joueurs … J’ouvre donc avec ça … Et voilà. Franchement, planquer ça dans une partition cachée … Je copie tout sur mon serveur …
Je pensais prendre une douche. Je te laisse l’ordi allumé ?
- Hmmm … M’non, c’est bon, j’ai tout. Tu voudras un résumé de ce que tu m’as aidé à dérober comme infos ?
Pff … ouais, comme tu veux. Laisses-moi ça … Dans un dossier sur le bureau, nommé à la date du jour, je suppose.
- Comme tout le reste du contenu de l’ordi quoi, j’ai l’impression … Tu devrais le nettoyer de temps en temps, il serait plus performant.
Je m’en sers pour caler correctement l’écran de ma télévision, ça te donne une idée de la « performance » souhaitée ? Au pire si j’ai besoin j’en prends un autre.
- Je ressens une douleur physique dans la poitrine à t’entendre dire ça … enfin bon. Bonne douche. Et merci encore pour tes services.
Hm. Elle décrocha le téléphone de son oreille pour observer le numéro anonyme. Connard avec une connerie de mission …
- Tu n’as pas raccroché.
Je sais.

Appuyant sur le bouton rouge, elle lança le vieux mobile à travers la pièce pour l’envoyer sur le canapé, et soupira … Avant d’allumer la radio de la salle de bain, et de se débarrasser de ses fringues, qui puaient la bière très bon marché. Elle allait vraisemblablement devoir mettre la tenue à tremper … enfin. Au moins elle aurait quelque chose à lire dans la soirée, visiblement.