Les cheveux jais, la peau pâle, une silhouette fine et élancée. Quelques mèches blanches apportent un peu de contraste dans sa chevelure pourtant si belle, et une unique mèche rouge rappelle ses origines. Des pupilles rubis, des yeux en amande, écho à la perfidie de son âme, ornant un visage aux traits pourtant angéliques. Elle avait tout pour être un ange à son âge, et ravir le cœur de tous sous un bel augure, mais ses cornes rappellent à tous les péchés de sa lignée. Tant de belles choses, ternis par peu de détails, pour une demoiselle pourtant si radieuse, mais à l’âme aussi sombre que son passé et ses origines. Il n’y a pas à dire, Hécate a tout pour plaire.

Cette jeune femme d’un mètre soixante-sept environ, pour un poids inconnu, a une silhouette frêle, et avec peu formes. En cause, son Alter. Mais ça, vous en comprendrez la raison dans un autre chapitre. Aujourd’hui, j’aimerai vous parler de la Hécate que vous voyez, là, en face de vous. Cette jeune femme dont le corps a valu bien des propositions, tant professionnels que personnels, tant légaux qu’illégaux. Ce corps qui lui a valu d’être peu à peu connue et reconnue, sans jamais s’intéresser à ce qu’elle était à l’intérieur.

Hécate, c’est d’abord une jeune femme souriante et agréable à vivre. Probablement un peu fille facile pour pouvoir survivre, elle a su s’adapter à la société, comme un nuisible dans une grande ville. Moduler sa personnalité en fonction des personnes en face d’elle, c’est devenu une habitude, presque une obligation. Tantôt gentille, à l’écoute et agréable, tantôt désirée, désireuse et sensuelle, elle est capable de presque tout adapter à elle. A retenir, son charisme presque sans faille et son éloquence. Elle attire les foules, elle les gère, elle les envoute. Mais ce changement de personnalité constante n’a pas été toujours à son avantage. A toujours changer de discours et de masque, son vrai « moi » s’est perdu entre deux comédies.

Hécate peut se montrer agressive, joueuse et extrêmement sadique. La douleur, ça la connait, et faire souffrir les gens ne lui fait pas peur. Le changement brusque de personnalité l’excite et bien plus, lui fait perdre tout bon sens. Un peu lunatique, presque bipolaire, une bonne soirée peut virer au drame si elle ne se contrôle pas. A la fois bête sauvage sans retenue et femme de la haute société, difficile de gérer un lion en cage.

Hélas, parfois, lorsqu’elle se retrouve seule, Hécate retrouve ses peurs et ses doutes. Pensive, morose et parfois mélancolique, elle ne sait plus trop où elle en est. Son passé resurgit, ses nuits sont soudain hantées par les cauchemars et les terreurs nocturnes, l’insomnie la guette, elle veut souffrir pour apaiser son âme. Noyer sa peine dans ton travail ou aux bras de personnes de renom -ou un minimum riche au moins-, ça la connaît. Phobique de la mort, du hasard et des circonstances, tout ce qu’elle ne contrôle pas l’effraie, et voir quelqu’un mourir sous ses yeux la tétanise. Pire encore, Hécate a peur de son propre Alter, de ce qu’il pourrait faire en évoluant. Hécate a peur de l’incontrôlable et du changement, tout simplement.

Hécate est née en Allemagne, dans un petit village calme, un soir d’été 2079. Karmen, sa mère, était une jeune femme de vingt-sept ans, que la vie avait toujours chéri comme une enfant lumière, et c’était le cas de le dire, son Alter était basé sur la lumière, et elle avait deux petites ailes d’oiseau dans le dos -inutiles, mais belles-, souvent cachées par ses vêtements. Engagée en tant qu’infirmière de catastrophe, elle avait dévoué sa vie à sauver des vies. Hélas, la naissance d’Hécate n’avait rien d’un heureux événement, elle n’était même pas désirée.

Raconter comment Karmen a rencontré Ludwig serait bien trop long. A l’époque, elle ignorait qui il était réellement, et était éperdument tombée amoureuse du beau et charismatique jeune homme qu’il était. Trois mois plus tard, elle était enceinte. Et la vérité ne tarda pas à tomber. D’abord, sa petite maison fut retournée par les forces de l’ordre, hurlant à tout bout de champ, menaçant la pauvre femme de leur indiquer où Ludwig était. Bien entendu, Karmen ne comprenait pas. Son cher et tendre amour était un marchant itinérant, il était peu présent, mais il n’avait rien fait de mal ! Eh bien, Karmen se trompait lourdement. Son homme n’était autre qu’un vilain reconnu des autorités, et activement cherché pour meurtres, torture, et cruauté. Son monde tomba en ruine. En quelques secondes, elle passa de la femme heureuse à une femme bafouée et trahie. Elle ne savait alors pas qu’elle abritait la descendance d’un monstre. Sa vie était foutue, elle était fichée comme la concubine d’un criminel. On la pointait du doigt dans la rue, on la huait, on la détestait.

Karmen entama un long et pénible déni de grossesse. Le verdict tomba trop tard, a quatre mois. L’avortement était impossible, et même si elle le pouvait, son corps ne pouvait pas tenir le choc. La seule solution était de faire naître cette enfant… Ou plutôt, ces deux enfants, car elle attendait deux petites jumelles, des fausses jumelles. Ce qu’elle fit, à contrecoeur. La première heure, elle refusait de les prendre dans ses bras. Mais lorsqu’elle dut les abandonner, elle se rua à corps perdu vers les bébés. Sa réaction n’avait aucun sens, mais c’en était déjà décidé. Karmen allait garder les petites. Leonidas Charlie Rosenberg. En l’honneur de sa grand-mère et sa sœur, et Selena Marie Rosenberg, en l’honneur de sa mère et son autre sœur.

Karmen avait réellement espéré pouvoir aimer ces enfants, mais plus elles grandissaient, plus elle lui apparaissait sous les traits de Ludwig : Leonidas avait deux petits yeux rouges, des mèches blanches rappelant les cheveux argentés de l’homme, une mèche rouge, symbole du sang qu’il avait versé. Pire encore, il y avait cette queue de serpent à sonnette. Selena, elle, avait des cheveux argentés. L’immondice couleur du péché. Et des yeux aussi rouges que le sang. Non, elle ne pouvait pas les aimer.  Elle n’y voyait que ça, les magnifiques cheveux jais d’Hécate, les mêmes qu’elle, leur peau si douce et claire, leur petit nez… Et ces magnifiques petites ailes d’oiseau… Une blanche pour Selena et une grise pour Hécate. Rien de tout ça ne frappait Karmen. Leonidas et Selena étaient simplement les filles de ce monstre. »

Leona et Selena étaient maltraitées et insultées par leur mère, Karmen, depuis le plus jeune âge. Alcoolique et dépressive, Karmen ne s’était jamais remise de la trahison de Ludwig, et de la naissance de sa descendance. Pourtant, les deux petites faisaient tout pour se faire aimer de leur mère, en vain. Leona commença à développer une graine de haine dans son cœur, qu’elle cherchait à étouffer.

Leona et Selena étaient inséparables. A l’école, c’était les meilleures, à la fois bonnes élèves et bonnes amies, tout le monde les aimaient. Et cette situation se renforça lorsque chacune éveilla leur Alter, à quelques heures d’intervalle. D’abord, Leona. A 4 ans, elle éveilla son Alter supposé maternel. Elle avait commencé avec la fleur de la classe, qui avait fané suite à un oubli d’un élève de l’arroser. Leona était triste, elle avait pris la plante dans une main, elle voulait vraiment que, quelque part, quelque chose la soigne, qu’elle aille mieux, cette petite fleur qui n’avait rien demandé. Lentement, les feuilles se regonflèrent, la tige se redressa et la fleur retrouva ses belles couleurs. Leona était bien la dernière à comprendre ce qu’il venait de se passer, mais quand on lui expliqua que sa mère faisait pareil, elle était heureuse. « J’ai quelque chose en commun avec maman ! ». Quelque chose comme ça. Leona pouvait soigner les animaux et les plantes… Les humains aussi. Leona nourrissait le rêve de devenir une héroïne, comme maman l'était, mais une vraie, cette fois, avec un costume !
Selena, quant à elle, éveilla un Alter un peu différent, mais avec un lien fort maternel. En cours de sport dehors, ils jouaient à la balle au camp. Alors qu’il faisait bien beau et chaud, Selena se mit à briller de milles feux et éblouie une élève qui voulait lui tirer dessus. Là encore, ô miracle, on lui dit que c’était comme sa mère, elle stockait la lumière du soleil, un peu comme une plante, pour rayonner autour d’elle. Bien que le mystère restait épais autour du fonctionnement de son Alter, on y voyait bien la marque de Karmen.

En rentrant chez elles, les deux petites voulurent partager leur découverte avec Karmen. Avec un peu de chance, elle les aimerait en voyant que leur Alter était une parfaite copie du sien. Leona profita d’une petite coupure que sa mère s’était faite. Elle la soigna, le sourire aux lèvres. « Regarde maman, c’est comme toi ! »… Grosse erreur. Le succès indiqua clairement à Karmen que ce n’était pas son Alter, qui ne fonctionnait qu’à la lumière du soleil. Elle gifla l’enfant pour la punir de ce faux espoir, et retourna s’enfermer dans l’obscurité de sa maison. Leona ne comprenait pas pourquoi sa mère était aussi méchante, mais une chose était certaine : jamais elle ne l’aimerait.  Selena montra son Alter à son tour, et brilla tel un soleil devant Karmen, lui apportant un peu de chaleur, et une vision angélique des plus magnifiques. Karmen sourit et félicita l’enfant malgré sa maladie, cette « dépression » qui l’habitait depuis des années. Leona commença à douter de la confiance et la loyauté de Selena, la « préférée ». Elle s’en éloigna doucement.

Seule dans sa chambre, Leona s’entraînait régulièrement, pour tester son Alter, si ce n’était pas celui de sa mère, c’était celui de son père ? Qui était-il d’ailleurs ? Personne ne voulait lui dire. Personne ne le connaissait. Née de père inconnue sur les fichiers. Elle devait le trouver. Trouver qui il était, quel était son alter. D’abord, elle essaya de se soigner quand elle se blessait. Cela fonctionnait. Elle avait appris qu’à force d’utiliser son Alter, elle avait faim. Quand elle mangeait, ça allait mieux. En s’entraînant, elle remarqua que ses cheveux poussaient plus vite, ses ongles aussi. Un jour, elle observa deux petites cornes osseuses sur sa tête. Qu’était-ce ? Devait-elle demander à sa mère, elle qui connaissait son père ? Inutile. Elle ne tarda pas à le découvrir, et la seule explication qu’elle eut fut une gifle monumentale et un tas de jurons. Papa avait-il des cornes comme Leona ? En plus de cette jolie queue reptilienne ? La petite avait l’impression de se rapprocher un peu plus de son père. Cependant voilà, Selena n’a jamais eu de cornes. Lorsque son Alter était trop chargé, une auréole lui poussait au-dessus de la tête. Deux jumelles, un ange, et un démon… La lumière et l’obscurité. Les deux opposés qui s’attirent, se battent et se repoussent.

Hécate continuait de s’entraîner, encore et encore, jusqu’à un jour réussir à faire sortir ses os. Ou plutôt, à créer des excroissances. D’abord petites, puis un peu plus grande, changeant de forme, elle ne tarda pas à comprendre comment tout ça fonctionnait. A huit ans, elle connaissait son Alter. A douze ans, elle savait le contrôler correctement. Cependant, voir un si bel Alter prendre une tournure démoniaque ne plaisait pas aux autres enfants, et bientôt, Leona devint la risée de l’école, la tache, la perfide. Surtout face à Selena, avec ses petites ailes blanches et son auréole sur la tête. Comment Leona avait tant pu s’éloigner de sa sœur, tant commencer à la haïr ? …

Leona était devenue ce qu’elle redoutait. La haine de sa mère se lisait dans les yeux de certains enfants… Et la vérité ne tarda pas à sortir de la bouche d’un inconnu. Au détour d’une bagarre entre Leona et des élèves où les parents avaient accouru, alertés par les cris, le nom de « Ludwig » sortit. Immédiatement, certains firent le rapprochement, d’autres se souvinrent de l’aventure que la jeune Karmen, innocente, avait eu avec cet homme cruel. La vérité, déformée, suggéra qu’au fond, Karmen aimait toujours Ludwig et que Leona était le fruit d’un amour inconditionnel. « Elle aurait pu l’abandonner ou la tuer ! Même avorter ! », c’était si simple pour eux, qui ne connaissaient pas la vérité. Et Selena ? Elle venait certainement d’un autre homme ! Cette petit ange avait tellement hérité de sa mère. Leona connaissait le nom de son père, mais avant tout, elle était désormais fichée comme fille de criminel, et sa vie devint un enfer : on la craignait, on la détestait, pour son passé. Chose agréable pour les autres, Leona était un Punching-ball qui avait de l’endurance, et qui soignait ses plaies assez vite, souvent trop vite pour être repérée par les professeurs. Selena, à côté, avait les éloges, la lumière et les compliments. C’était dégueulasse. Et quand Leona répétait qu'elle voulait devenir une héroïne, cette fois, plus d'encouragements... On lui disait qu'avec un Alter aussi dégoûtant, elle pourrait, au mieux, devenir une vilaine très connue. Mais cette perfide petite ange, elle, avait tous les encouragements du monde, on l’incitait à devenir une « héroïne ». Mais Leona voulait devenir une héroïne, pas Selena. Leona voulait... Hélas, un accident arriva très vite…

Leona avait treize ans. Ce jour-là, elle avait été déjà bien amochée par sa mère, avant de partir. Selena évitait les coups avec brio, en activant son Alter, en rappelant à sa mère qu’elle était sa digne fille. Devant l’école, Selena eut une parole de travers, un « Tu ressembles beaucoup à Ludwig, d’après maman ». Trop tard. Le mal était fait. Comment Karmen pouvait parler de son père à Selena, et comment Selena pouvait avoir les confidences de sa mère ? C’en. Etait. Trop.

Tout se passa très vite. L’Alter de Leona s’activa sans contrôle, et une de ces fameuses excroissances se planta dans le ventre de sa sœur. Sa sœur bien aimé, l’ancienne compagne de ses malheurs, l’enfant à qui le monde souriait. Voir cette petite lumière faiblir figea Leona. Que venait-il de se passer ? Elle rétracta son excroissance, elle ne savait pas si elle devait fuir ou hurler. Elle devait faire quelque chose. Elle commença à pleurer, en se ruant vers Selena. Avec un peu de chance, elle pouvait la sauver, elle que le monde aimait. Leona posa ses mains sur la plaie, les yeux embrumés par les larmes. Elle essayait de la sauver. Elle voulait la sauver. Elle sanglotait, elle criait à l’aide, elle marmonnait des excuses, alors que sa sœur, d’un léger sourire, lui souffla :

« Tout…. Va bien… Charlie… C’est… Pas grave… »
« Tais-toi Marie ! Tais-toi ! Ça va pas du tout ! Je suis désolée ! Ne meurs pas ! »

Leona dépassa le peu de réserve d’Alter qu’elle avait… Et un autre drame se produisit. Ses ailes perdirent leurs plumes, les si belles plumes de maman, dernier lien qu’elle avait avec elle, et sa chair sécha, changea de couleur pour un noir sombre, et tomba. Il ne resta que les os et un peu de chair. Mais cela ne suffisait pas. Leona n’arrivait pas à soigner Selena, son soleil. Elle continua, elle appelait à l’aide tout en essayant de l’aider avec son Alter… Et le signe distinctif de son père, sa partie reptile, dépérit elle aussi. Mais cela ne suffisait toujours pas. Il fallait encore tenir bon, quitte à donner sa vie pour elle, qui n’avait rien demander. De toute façon, tu n’étais pas essentielle à ce monde, Leona, tu pouvais mourir… Selena elle, en revanche, était la digne successeuse de sa mère, une véritable graine de héro !

Une main se posa sur l’épaule de Leona, puis l’écarta de Selena. Il y eut des cris, des insultes, des bruits de sirène, des gestes, des mots. Puis le noir complet. Lorsqu’elle se réveilla, Leona était à l’hôpital, dans la même chambre que sa sœur, branchée à des machines.

« … Elle a eu de la chance… Leona n’avait pas été là… Serait morte. »
« … Foutez de moi ?! … Essayé de la tuer ! C’est ma fille ! »

Leona ne percevait que des brides de mots, ses oreilles sifflaient, sa tête lui faisait horriblement mal, elle avait du mal à respirer. Elle portait un masque pour l’aider, alors que son corps était faible. Ces mots, elle s’en souviendrait. Elle pouvait soigner les gens. Mais elle se blessait. On lui expliqua qu’elle avait abîmé son propre corps en sauvant sa sœur, et qu’elle devrait rester alité. Hélas, pour ses ailes et sa queue, c’en était fini. Lorsqu’on lui proposa de retirer ce qu’il restait de « vivant », à savoir les os et quelques muscles encore actifs, Leona hurla. Elle ne voulait pas perdre ce qu’il lui restait. Même si c’était moche et inutile, c’était encore à elle. Elle apprendrait à vivre avec. Peut-être même qu’elle pourrait faire comme ses excroissances et les « ranger ». Personne n’y verrait rien, et Papa et Maman vivrait avec elle pour toujours. Dans cette chambre d’hôpital, il y avait Karmen, pleurant toutes les larmes de son corps pour Selena. Leona avait sa réponse, jamais Karmen ne pourrait l’aimer. Pas après ça. Il y eut un long et bruyant « bip ». Encore plus de cris, et de pleurs. Leona vit vaguement les médecins éteindre les appareils, poser un drap sur Selena. Pourquoi ? Leona essaya de se lever, mais elle n’en avait pas la force. Les larmes coulaient sur ses joues. Elle savait ce qu’il se passait, tout en l’ignorant. Son âme criait, hurlait de douleur, comme si quelque chose tentait d’arracher la moitié de son être. Selena était morte. Par sa faute. Et Karmen n’allait pas la laisser s’en tirer comme ça.

Une semaine plus tard, Leona sortit de l’hôpital. Avec quelques traitements de choc, du repos et de bons repas pour se soigner, elle était presque refaite. Elle pouvait retourner dans l’enfer de sa petite vie misérable. Ou presque. A l’école, elle était devenue le monstre qui avait tué sa sœur, et tout le monde oubliait qu’elle avait vraiment essayé de la sauver… A part lorsqu’il fallait soigner quelques bobos, bien sûr. A la maison, Karmen commença à exploiter l’Alter de Leona, en lui rappelant que pour le prix d’une vi si précieuse volée, elle devrait donner la sienne.

Le reste de sa vie fut linéaire, dans cet enfer, jusqu’à ses dix-huit ans. Outre le déménagement avec sa mère vers les Etats-Unis quand elle avait quatorze ans, puisque Madame ne pouvait plus supporter de retrouver le nom de Ludwig sur toutes les bouches depuis l’incident avec Leona et qu’elle n’arrivait pas à faire son deuil de la Grande et Sublime Selena, elle avait décidé de plier bagage, d’emporter sa gosse comme un vulgaire animal de compagnie, et elle s’installa dans un appartement miteux aux USA. Bref. La vie quoi. Leona était jeune et belle, elle plut rapidement aux chercheurs de talents. Autorisation parentale oblige, Karmen fut mise au courant qu’Hécate pouvait faire longue et prometteuse carrière dans le mannequinat. Il suffisait d’agiter quelques billets, et Hécate était déjà promise à ces grandes entreprises. Bref. La vie quoi ? Hécate y trouva un peu de répit, et une passion pour les projecteurs. Au moins, Karmen avait eu une bonne idée, pour une fois… Même si elle récoltait tout ce qu’Hécate gagnait… Ça ne durerait pas. Ah oui, « Hécate ». J’ai oublié de vous en parler. Lorsque Leona a signé son contrat, elle a été « vendue » à l’entreprise. Non pas officiellement, mais officieusement. De ce fait, elle en a profité pour jeter son nom de naissance aux oubliettes pour endosser le pseudonyme d’Hécate, devenu nom d’usage. Ça sonnait bien, l’entreprise a accepté, ça attirait les yeux vers elle.

Karmen avait compris qu’il y avait un autre business à monter grâce à sa fille. Son Alter guérissait les gens et elle, la grande Karmen de Lumière, avait « perdu » son Alter lorsqu’elle avait sombré dans la dépression, à croire que pour accepter la lumière, il fallait déjà être dans la lumière. En plus de son travail de mannequin, Karmen lui imposa de soigner les petits délinquants et les vilains avec son Alter. Son dû ? De la bouffe correcte pour se recharger. Rien de plus. Hécate n’était qu’un outil pour arriver à ses fins, à se payer de l’alcool et quelques plaisirs. Oui parce que Karmen sortait désormais dans les casinos et jouait de manière compulsive. Comme si elle pouvait se le permettre… Bref. L’enfer continuait, peu importe où Hécate était. Et en plus de l’enfer quotidien, les nuits d’Hécate étaient tourmentées par son crime, la mort de sa sœur, même si elle avait été jugée d’accidentelle. Hécate ne voulait pas la tuer, et si les secours étaient arrivés plus tôt, elle aurait pu être sauvée. Un peu plus tard, et c’est deux enfants qui seraient décédées.

Un soir d’hiver, en 2098, alors qu’Hécate avait dix-neuf ans, on lui en demanda un peu plus, un peu trop. La blessure d’un vilain était tel qu’elle ne pouvait tout simplement pas être soignée. D’abord, Hécate eut faim. Puis, des blessures commencèrent à apparaître sur son corps, suivi de nécroses sur sa magnifique peau. Sous la menace, elle ne pouvait se permettre d’arrêter tant que ce criminel n’était pas « en vie ». Putain, Karmen, tu aurais dû savoir que ce genre de chose allait arriver un jour ! Hécate cherchait une solution de survie, si bien qu’elle observait désespérément les recoins des lieux. Juste quelque chose d’utilisable. De la bouffe, quelque chose. Là. Il y avait ce chien. Il était malade, ça se voyait. Il traînait, le nez au sol. Lorsqu’il passa à proximité, tu le choppas par le cou. Ce qui s’en suivi n’était pas joli à voir, mais Hécate allait crever. C’était elle ou ce chien. Il commença à couiner, à faiblir, à grogner, et des plaies apparurent sur son pelage, il perdit ses poils, il semblait mourir d’une défaillance généralisée. C’est là qu’elle eut une idée : si elle s’enfuyait, ils ne pourraient pas la tuer. Et Karmen, on s’en fichait. C’était décidé.

D’abord, son corps se régénéra. Mais les blessures du vilain elles, ne bougèrent pas. Hécate s’éloigna lentement du corps, et activa son Alter. Elle créa des excroissances tranchantes au bout de ses doigts et agressa l’autre vilain, qui accompagnait le blessé. Son but n’était pas de le tuer, mais de lui faire peur pour pouvoir s’enfuir. Hécate s’agitait dans tous les sens, question de survie, elle avait faim, elle crevait de faim. Elle devait fuir, pour sa vie. Abandonner sa mère, cette saleté de Karmen, et vivre sa vie. Elle avait son travail, elle pouvait s’isoler. Sans réfléchir, sans penser, Hécate agressa une dernière fois le vilain, puis s’enfuit, le chien mort sous le bras. Ce jour-là, Hécate apprit que son Alter pouvait voler la vie des autres. Des animaux, des plantes. Elle avait dormi dans l’herbe d’un parc, à son réveil, l’herbe y était dépérie. Elle avait aussi appris, en se réveillant que manger une chair morte, putride, comme celle de ce chien, lui était bénéfique. Mais uniquement si elle-même n’avait pas faim, car les vomissements qu’elle eut lui rappelaient qu’elle était humaine avant d’être ce monstre. Hécate était bien le monstre dont tout le monde parlait, semant la mort autour d’elle.

Hécate se réfugia à son agence, avant de demander son transfert à Starfish. Là-bas, on lui donna un logement, de quoi vivre, sans rien dire à sa mère. Sous tutelle de l’agence, elle pouvait vivre normalement et s’adonner à la découverte de son Alter. Parfois, elle se surprit à son complaire dans la torture de petits animaux, avant de les dévorer, sans prendre le temps de les cuisiner. Lorsqu’elle avait faim, elle mangeait, comme tout le monde. Il y avait cette part d’humaine, vivant en société, et cette part d’ombre, ce monstre qui dégoûtait. En un an, Hécate apprit que son Alter fonctionnait sur tous les os de son corps. Son Alter devint un coup de pub pour l’agence, son image n’en fut que renforcée, petit bénéfice de pouvoir sortir et rentrer des petites ailes de démon, et une queue similaire. Plus récemment, grâce à l’excroissance d’une colonne vertébrale complète, Hécate a appris qu’une double ossature signifiait un renfort de son propre corps, pour tenir des choses plus lourdes, amortir des chocs, etc. Et surtout, des photos encore plus belles. Elle jonglait entre les séances photo, les interviews, la télé, sa petite vie dans l’ombre, et une autre passion : la musique. Hécate s’était offert un violoncelle, et un piano, grâce à son agence. Eh oui, parce qu’être belle et musicienne, ça attire ! Bref. Hécate comprit que plaire aux autres, aller en leur sens, était bon pour les affaires et pour elle. Elle fut même invitée à une émission après l’attentat, pour recueillir son avis sur la situation. Et bien entendu, impossible de dire le fond de sa pensée. Hécate joua des larmes et du drame, et clama que c’était inadmissible, inhumain et cruel de faire une chose pareille. Que nenni. C’était tout le contraire qu’elle pensait, mais qu’importe. L’essentiel, c’était que Karmen n’était plus, pour elle. Et qu’elle était enfin libre.


NB : L'existence de Selena a été effacée, pour effacer l'accident. Seul le village d'origine d'Hécate est au courant, de même que le fait que Ludwig soit le père d'Hécate. Par son pseudo "Hécate", personne ne connait son identité réelle (Prénom, nom, date de naissance, origine, etc), l'aspect 2 de son Alter est caché du monde aussi (même Karmen ne le sait pas). Quand on lui demande "qui sont vos parents ?", elle répond juste qu'ils sont morts.

- Démarrer une carrière dans le mannequinat
- Apparaître à la télévision
- Faire une couverture d’un magasine peu connu
- Apparaître sur une affiche d’un magasin de vêtements/maquillage
- Commencer une pseudo-carrière en musique

- Se débarrasser de sa mère
- « Sauver » la vie d'une personne (même si elle est morte après)
- Tuer sa soeur (accidentellement)
- Soigner un vilain (qui est mort quelques minutes plus tard)
- Survivre à une attaque de vilain
- Tuer et manger un animal (sisi, je vous jure, c’est un haut-fait !)
- Avoir son rêve brisé par la société
- Avoir renié ses origines et sa propre famille au profit de soiHeu... Pas inconnue, mais pas super connue. Disons qu'être mannequin et faire (parfois) des concerts de musique (violon/violoncelle et piano) ça la fait apparaître dans les magasins, sur des affiches et parfois à la télé, quoi. Haha... Heu... On va dire qu'elle se débrouille, mais c'est pas folichon. Elle a encore des  nécroses d'accidents, elle fait dépérir quelques trucs accidentellement parfois et elle a du mal à gérer sa limite (inférieure et supérieure) de sa réserve de génération... Soigner les autres c'est pas maîtrisé du tout. Mais dans la pratique (outre ces détails), elle gère la fougère (fin bon, faire pousser des os c'est pas trop compliqué) ! (Fiche Alter) Pour l'instant, rien à l'horizon !- Régulièrement maltraitée par sa mère (souvent ivre)
- Découvre son Alter a 4 ans (1er Aspect)
- Malmenée à l’école
- A tué sa soeur (l'a sauvé mais elle est décédée un peu plus tard)
- A fait un séjour à l’hôpital à cause de son Alter
- Forcée de soigner un vilain (qui est décédé plus tard)
- S‘est fait attaquer, et a attaqué, un vilain
- A perdu le contrôle de son Alter et de ses émotions
- A tué un chien et l’a mangé, a découvert le 2ème aspect de son Alter
Eh bien. Un rêve lointain serait de devenir héroïne, pour montrer que l'Alter ne fait pas le moine /MUR/, mais disons qu'elle n'y réfléchit pas franchement, c'est juste une idée comme ça. Ça la gave qu'on lui dise qu'elle a l'Alter idéal pour être une Vilaine, et qu'on se foute d'elle quand elle dit qu'elle veut devenir une héroïne.

Sinon, bah être super connue ce serait génial pour elle, autant niveau mannequinat que pour ses compétences de musique. Elle fait beaucoup de choses dans sa vie, mais peu sont vraiment bien, et le mannequinat c'est tant son gagne-pain que sa passion.

Punitif. Ce mot décrit ce qu'elle en pense. Certes, on peut comprendre les soucis liés aux coûts, aux dégâts, etc... Mais c'est immoral d'empêcher quelqu'un de réaliser son rêve juste parce qu'il n'est pas assez "prestigieux" pour la société. Un héro, c'est pas riche, c'est pas son passé qui va le définir, ni ses origines. Si on a un alter pourri, cela ne doit pas influencer nos rêves. C'est dégueulasse. En plus, suivre les héros comme des vulgaires animaux, c'est inhumain. Franchement, bon débarras.C'est con mais bien fait. C'est l'exemple même des dérives du système. Même si c'est pas joli joli, hein, c'était un coup de génie. Au moins, ça a permis le changement, le réveil des gens et un vrai pas en avant dans la société.Là où Hécate pensait son rêve irréalisable et où elle vivait sa vie du mieux qu'elle pouvait, l'annonce des événements, ou plutôt leur suite, fit naître une flamme nouvelle dans son coeur et dans son âme. Ainsi, elle pouvait devenir ce qu'elle voulait : une héroïne, et montrer à tous ce qu'elle valait vraiment. Ça c'était la réjouissance, la joie, le bonheur.  Aujourd'hui, tout lui semble à porter de main.L'idée de laisser sa chance à tous est un concept qui charme vraiment Hécate. L'école serait l'endroit idéal pour prouver à tous qu'ils ont tort. Non, franchement ? Ils ont eu une idée de génie. Laisser sa chance à tout le monde, peu importe son âge ou sa vie. C'est cool. Respect.