Les interventions faciles ne sont pas légion

Ce matin-là, en sortant des douches communes propres à son dortoir, Irina se retrouva face à un troupeau composé d'innombrables individus de sexe féminin, toutes entièrement identiques les unes des autres. Vêtue d'une simple et unique serviette de bain pour cacher les attributs avantageux de son corps, la brune resta plutôt neutre, habituée par les réveils en fanfare de la part de cette chère madame Allen. En effet, il s'agissait là de l'alter de cette dernière qui la contraignait, plus ou moins, à être constamment entourée de plusieurs de ses clones aux traits de personnalités divers. Il était parfaitement possible d'être interpellé par l'une d'entre elles qui soit complètement "déjantée" ou bien par une autre en pleine "crise existentielle" ou même par une qui soit une vraie "pipelette".

En général, si vous aviez de la chance, vous tombiez sur l'une de ces facettes encore de bonne humeur de si bon matin. Dans le cas contraire... Bonne chance et puisse le sort vous être favorable ! D'un autre côté, il y avait aussi les élèves les plus ingénieux qui développaient chaque jour des techniques astucieuses, mais plus farfelues les unes que les autres, pour tenter de lui échapper et de passer outre ces salutations matinales bien trop bruyantes et agitées à leur goût. Quant à elle, Irina avait appris à faire avec et à attendre que le moment passe. Après tout, cela partait toujours d'une bonne intention de la part de leur professeur aussi bienveillante que possible.

Soudain, ce fut lors d'un bref instant d'inattention que l'apprentie héroïne n'aperçut pas l'un des clones s'approcher d'elle furtivement. Il s'agissait là de la facette "perverse" de madame Allen qui ne manqua pas de tirer légèrement - du bout de son index - sur sa serviette, dans le but d'y apercevoir sa généreuse poitrine. « Oh ! Il y a du monde au balcon à ce que je vois. » constata-t-elle de façon très indiscrète. Surprise et quelque peu gênée, Irina resserra aussitôt sa serviette contre elle. « Qu'est-ce que... ?! Ça ne va pas ?! » fit-elle alors, embarrassée, tandis que le clone de la professeur continua de la taquiner un peu avant que la brune ne se décide finalement à regagner sa chambre afin de s'y préparer comme il se doit.

La première étape consistait à prendre soin de son corps et, surtout, de sa peau en se badigeonnant d'une crème conçue spécialement à cet effet et en la faisant bien pénétrer dans chaque centimètre de son épiderme. Ensuite, elle enfilait soigneusement son précieux costume héroïque de Miss Waldorf, toujours propre et minutieusement repassé. Enfin, il ne lui restait plus qu'à choisir une coupe de cheveux pour la journée. Aujourd'hui, elle avait opté pour un chignon, accompagné d'une épaisse frange afin de cacher son troisième œil. C'était simple et joli à la fois. À présent, il ne lui restait plus qu'à ajouter une touche très discrète de maquillage pour que tout soit parfait.


Pourquoi cet accoutrement ? Tout simplement car le premier cours de la journée n'était autre que celui de madame Allen.

Une fois qu'elle eut terminé, l'étudiante se mit en route vers le terrain d'entraînement plus ou moins couvert pour l'occasion à cause de la pluie qui ne manqua de lui filer quelques frissons assez désagréables, en plus d'abimer sa belle coiffure du jour. Décidément, cette matinée commençait plutôt mal. Bien heureusement, leur professeur les attendait patiemment et leur proposait même à tous une serviette pour se sécher ainsi qu'un chocolat chaud qui ne pouvait guère se refuser à un tel moment. D'ailleurs, ce fut encore le clone aux penchants pervers qui vint l'accueillir, la mettant une fois de plus mal à l'aise avec des remarques plus déplacées les unes que les autres sur son physique. Mais qu'avait-elle bien pu faire pour mériter cela ?

Par la suite, lorsque la plupart des élèves furent présents, ce fut à ce moment que la professeur décida de prendre la parole afin de les saluer ainsi que de leur expliquer le principe du cas pratique d'aujourd'hui. Se faisant entendre par l'intermédiaire d'un mégaphone, la femme démarra une brève introduction qui s'anima en moins de temps qu'il n'en fallut pour le dire. En effet, au même moment, des mannequins réalistes aux allures de civils s'approchèrent calmement du troupeau d'élèves. Il semblait y en avoir un pour chacun d'entre eux. De son côté, tout en sirotant son chocolat chaud de plus en plus tiède, Irina analysa sereinement du regard la mystérieuse marionnette animée qui venait tout juste de lui être attribuée. Ce qui était sûr, c'était que ce cours risquait d'être des plus intéressants qui soient.


Quand soudain, une bruyante détonation vint la faire brusquement sursauter, détournant ainsi son attention du civil factice. Une étrange lumière vint même la contraindre à fermer les yeux quelques instants. « Qu'est-ce que... ?! » Lorsqu'elle rouvrit ses globes oculaires, la brune put constater un chaos des plus inattendus, chacun des mannequins assignés à un étudiant ayant une réaction particulière liée à un sentiment bien précis : la panique. Fronçant les sourcils face à cette pénible situation, l'apprentie héroïne soupira avant de reporter de nouveau son attention sur son civil personnel. « Bon... Je vois. Surtout pas de pani- » rassura-t-elle avant de s'interrompre aussitôt en constatant, impuissante, la disparition de ce dernier. « Mais... Qu- ? MERDE ! » grogna-t-elle rageusement, très surprise.

Sa tasse, qu'elle venait de lâcher maladroitement, vint se briser sur le sol, tandis que le restant de son contenu se répandit - peu à peu - à ses pieds. D'un mouvement vif, elle se débarrassa également de la serviette qu'elle avait soigneusement placée sur ses épaules afin d'éviter que de fines gouttelettes d'eau ne viennent s'écouler depuis ses cheveux jusqu'à sa nuque. Suite à cela, Miss Waldorf se fraya tant bien que mal un chemin à travers la foule d'élèves, cherchant du regard le mannequin dont elle avait la charge. Quelle galère ! Tout c'était passé si rapidement. Elle n'avait même pas eu le temps de se préparer psychologiquement à une éventualité de la sorte. Fort probablement comme la plupart de ses semblables cela dit.

Puis ce fut seulement après plusieurs longues secondes que l'adolescente l'aperçut finalement disparaître derrière l'un des grands édifices, courant comme pour fuir un potentiel danger. Il fallait le rattraper et vite ! De ce fait, Irina parvint à s'extraire de la foule, se lançant immédiatement à sa poursuite. Si ça se trouve, elle venait déjà de perdre bon nombre de points à cause de cet incident, si tant est que cet exercice soit noté. Quoi qu'il en soit, elle ne pouvait guère se permettre la moindre erreur. Elle devait se perfectionner et acquérir de l'expérience. « Je sais... » se murmura-t-elle, après avoir eu une idée. Habilement, elle tissa alors - depuis l'extrémité de ses doigts - d'épais fils verts qui s'agglutinèrent solidement aux parois des constructions présentes autour d'elle. Suite à quoi, elle se hissa avec souplesse et agilité afin de prendre de la hauteur, enchaînant ainsi d'un bâtiment à l'autre, à la recherche de son civil factice paniqué.

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