this is me
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Il m’est souvent arrivé de me poser la question.
Était-ce par contrainte ? Un choix prémédité ? Ou un imprévu ? A moins que la faute en incombe à mes traits marqués et ma pilosité déjà abondante, et qui, couplés au faciès disgracieux d’un bambin, ont purement et promptement écœuré ma génitrice ?
Dans tous les cas, elle eut tôt fait de se détourner de moi.
Et c’est ainsi que, abandonnée dès la naissance, je n’ai eu d’autres choix que de moi-même me construire.
Seule.
Ah… A qui vais-je faire croire ça ?
On ne grandit pas seul. Notre espèce est telle qu’elle est constamment braquée sur autrui. Que cela soit en bien ou en mal, on existe sous le regard parfois aimable, parfois critique, d’autres individus eux-même soumis aux regards des autres.
Vous auriez beau vouloir être seul, vous auriez beau chercher la paix, ils seront toujours là pour vous rappeler qu’un paquet de milliards d’autres humains vous entourent, et vous observent. Et hélas, puisqu’il nous a fallu naître sur la même planète, il ne nous reste alors plus que deux simples options : cohabiter, ou s’affronter.
Aujourd’hui, je suis incapable de définir en quoi a consisté mon parcours.
Ai-je lutté pour ma survie ? Ou me suis-je simplement fondue dans un système déjà bien huilé, en parfaite symbiose avec les autres ?
Dans un cas comme dans l’autre, c’est en évoluant dans la crasse et la pourriture d'une grande ville de l’ouest parfaitement lambda que je me suis construite. Épaulée par des gens, parfois ralentie par eux. Je n’ai jamais cherché à entretenir quelque relation que ce soit avec tous ces individus ; et pourtant, force est de constater que c’est en les jaugeant, en les laissant me juger, en interagissant entre nous, et en ne le faisant pas, que je suis devenue celle que je suis actuellement.
Depuis toute petite déjà, j’ai affiché la même facette introvertie au monde. Renfermée, glaciale, hostile. Des yeux habités par une constante colère froide, qui semblait crier à tous ces regards : foutez-moi la paix.
En y réfléchissant bien, je suis curieuse de savoir comment j’ai survécu. Je crois bien qu’un groupe de sans-abri m’a prise en pitié, mais je n’en suis plus sûre. Mes souvenirs de l’époque sont extrêmement flous et diffus, et j’ai toujours considéré ce filtre opaque posé sur ma mémoire comme le fervent gardien d’un temps dont je ne souhaite plus rien savoir.
Non pas que le reste de mon existence soit plus gai, cela dit.
J’ai passé ma tendre enfance dans la mendicité et le vol. Mon alter était surprenamment disposé à cette vie là : une ouïe assez fine pour entendre les menaces approcher, des jambes dont la vélocité convient à la fuite, et une fourrure tout juste suffisante pour survivre au plus froid des hivers.
Ce que je viens de vous décrire là, ce sont les dix premières années d’une fillette discrète et pragmatique. Jamais je n’ai cherché à m’élever au dessus de ma condition, jamais je n’ai voulu m’extirper de cette encrassement. Je me suis simplement contentée de survivre, et c’est certainement grâce à ça que j’en suis là aujourd’hui.
Grâce. Ou à cause. J’avoue ne plus chercher à faire la distinction.
Je suis simplement devenue celle que je suis. Une femme désabusée qui vit au jour le jour, sans savoir ni espérer de quoi demain sera fait.
Mais avant cela, il m’a fallu grandir. Dès que j’en ai eu l’âge, vers mes treize ans, j’ai pu rendre quelques services aux gens du coin. Cela m’exposait à plus de regards, mais… C’était un mal pour un bien. Je faisais circuler leurs sachets, en échange de quoi je mangeais mieux. Ce n’était en rien prudent, mais cela m’importait peu, ni ne m’empêchait de dormir. Tant que cela m’assurait de quoi survivre pour le lendemain, cela me convenait.
Vers mes seize ans, je suis passée à l’étape supérieure. Il y avait d’autres types de services que je pouvais rendre. En échange de mon attention, et de ma dignité, j’apportais du soutien à ceux qui en recherchaient éperdument. Cela me permettait de toujours mieux me nourrir, et je ne dormais fondamentalement pas plus mal.
De fil en aiguille, j’ai tissé de nombreux liens avec les groupes régents du coin. Ils étaient prêts à m’offrir un travail, un toit, un revenu, pour peu que je sache être docile. Ce n’était en rien plaisant, mais je savais déjà courber l’échine, et j’avais besoin de survivre. Cela ne m’empêchait en rien de taper du pied quand je l’estimais nécessaire – le tout était de simplement savoir comment maintenir l’équilibre précaire entre cette cohésion et mon indépendance. Se soumettre sans se laisser piétiner, c’était ce à quoi je dédiais mes journées.
C’est ainsi que j’ai continué d’évoluer, sous le regard toujours plus analytique de ceux devenus mon entourage. Ils n’étaient en rien mes amis, j’ignore même si je pouvais réellement les considérer comme des collègues, mais ils étaient là, à constamment me juger.
Le plus dur n’était alors pas de savoir quand maintenir le regard ou quand l’abaisser.
Le plus dur était de savoir comment se regarder soi-même dans un miroir.
My story
histoire
Dans la fraîcheur de la nuit, les citoyens malmenés d’une ville impitoyable viennent s’abandonner à l’ivresse et l’observation. Si la musique qui règne en arrière plan a le don d’assourdir mes tympans, ce soir là, elle est loin d’être la chose la plus désagréable que j’ai à supporter. La chaleur étouffante et la pénombre lugubre d’une arrière salle faussement aménagée en bureau sont également devenus les cadets de mes soucis.
« -Tu ne peux plus continuer comme ça. »
Je sens et j’entends mon cœur tambouriner contre ma poitrine. L’adrénaline de l’événement est toujours présent, et c’est avec défiance que je tape du poing sur la table.
« -Et tu voulais que je fasse quoi ? Que je la laisse se faire agresser ? »
L’homme assis en face de moi me toise sans broncher.
« -J’aurai voulu que tu ne touches PAS à un de nos clients. C’est aux gardes de les mettre dehors en cas d’abus, pas aux filles. Tu imagines la réputation que l’on va se coller, sinon ? »
Mais je ne décolère pas.
« -Le temps qu’ils rappliquent, le mal aurait été fait ! Je suis intervenue juste à temps pour éviter à cette pauvre fille de faire des cauchemars tout le reste de la nuit ! »
Il hausse alors le ton.
« -Bon sang, mais qu’est-ce qui t’arrive Velvet ? »
Son énervement est palpable, bien assez pour que je me ravise de rétorquer.
« -Cela ne te ressemble pas, de faire des vagues, comme ça ! Des… Des années que tu travailles ici, avec nous, et tu es toujours restée relativement sage ! Pourquoi une telle hardiesse, d’un seul coup ? »
Je renifle, méprisante.
« -Quoi ? Tu es vraiment surpris d’apprendre que ton gentil et soumis bétail possède des sentiments, lui aussi ? »
Il lève les yeux au ciel d’un air exaspéré.
« -Mais enfin, qu’est-ce qu’il te prend ? »
Je m’apprête à répliquer, mais il me devance.
« -Tu es au courant que tu es sur la pente descendante, tout de même ? Tu penses VRAIMENT que c’est le moment de faire la maligne ? »
Son insinuation ne me plaît pas du tout, et je plisse les yeux avec méfiance.
« -C’est-à-dire ? »
Il soupire, réticent à continuer. Il finit malgré tout par le faire, et me désigne d’un mouvement nonchalant de la main.
« -Regarde-toi. Regarde ce que tu nous rapportes… Désolé de te dire ça, mais tu te fais vieille, ma belle. Tout ce délire, là, autour de la fourrure… Cela ne prend plus. Les gens veulent… Autre chose. »
A l’entente de ces mots, je secoue la tête de gauche à droite, pensant halluciner. Est-ce que… ?
« -Est-ce que tu es en train de me mettre à la porte ? »
Il lève les mains en signe de passivité.
« -Je ne suis en train de rien faire du tout. C’est toi qui joues avec le feu, ma lapine. »
Je serre dents et poings. Ok, ça, c'est la goutte d'eau.
Furieuse, je me détourne et rallie la porte. A peine l’ai-je franchie que la fille de tout à l’heure m’interpelle, en panique.
« -Velvet ! Je suis désolée, je… ! Je voulais simplement te remercier pour-
-Dégage. »
Je l’écarte de mon chemin d’un mouvement du bras, et me dirige à grands pas vers la sortie. J’ai besoin de prendre l’air, d’être seule, et vite, loin de ce travail minable et de ce lieu de débauche, où se mêlent l’odeur nauséabonde de l’alcool et un parfum de souillure persistant.
***
La froideur et l’hostilité de mon studio ont quelque chose de réconfortant.
Qui aurait cru que je parviendrai à avoir mon propre chez-moi, vingt ans plus tôt ? Ce n’est en rien grand, confortable ou majestueux, mais cela le sera toujours plus qu’un carton au coin d’une ruelle.
La lumière diffuse des lampadaires traverse à peine les carreaux poisseux et vieillis de ma seule fenêtre. Abaisser l’interrupteur jauni me permettrait de profiter d’un éclairage certes fébrile, mais bien réel – pour autant, je me complais à laisser mes pensées se perdre dans l’obscurité. Lorsque mes nuits consistent à me donner en spectacle dans une pièce emplie de néons et noyée sous des sons absurdement tapageurs, retrouver l’insouciance du noir est un plaisir dont je peux difficilement me priver.
Alors que je jette nonchalamment ma veste dans un coin, je me laisse guider jusqu’à un futon aux rebords rongés par le temps. Mes pieds survolent avec désinvolture le craquelant parquet, et m’amènent jusqu’à un abyme de paresse où je m’abandonne pleinement.
En toute franchise, je ne pourrai en rien jouir de tout cela si je m’étais montrée frileuse devant l'emploi. Pour autant, les années passent et je sens de plus en plus ma patience s’effriter. Avec l'âge, quelque chose en moi est en train d’évoluer, et me conduit inexorablement vers le départ du seul job qui me permet de subsister.
Que dois-je faire ? Continuer de salir mon corps et mon esprit au service d’une vie soumise mais stable, ou brandir bien haut le peu de dignité qu’il me reste au profit d’un chamboulement à l’issue incertaine ?
C’est le genre de questions qui m’empêchent de fermer l’œil, dernièrement. Ce qui est plutôt déroutant, quand on a toujours appris à bien dormir, le peu de temps où on en a l’occasion…
***
Le lendemain, l’inattendu est survenu.
Et tout s’est
effondré.
Alors que je prends conscience de la nouvelle, nous sommes déjà en fin d’après-midi, et je m’apprête à partir pour le travail.
Si les héros n’ont jamais rien représenté pour moi, à part peut-être de pénibles obstacles durant mon enfance, je dois reconnaître que leur totale disparition a de quoi m’inquiéter. Moi qui n’ai sans doute jamais trempé du bon côté de la loi, je réalise que ma situation peut difficilement s’améliorer en leur absence.
Plus personne n’est en sécurité. Nul part. Si j’ignore la portée concrète de leurs actions, l’impact psychologique que la nouvelle va avoir sur les Hommes de peu de conscience va, lui, être conséquent.
Et moi dans tout cela ? Quel va être mon rôle ? Puis-je vraiment perdurer avec ma situation actuelle ? Dois-je aller dans le sens de la vague, prendre le pli ? Et si oui, dans quel sens ? Profiter d’une potentielle anarchie pour m’installer ou au contraire sortir de mon trou et m’illustrer ?
Je crois qu’il est temps pour moi de prendre une décision. Et vite.
L’avenir d’un pays tout entier se joue certainement dans les jours, voire heures qui suivent, et je dois m'assurer de garder mon propre futur sous contrôle. Je n'ai pas autant bavé pendant les trente dernières années pour que tout s'effondre comme ça !
***
Son visage se décompose à ma vue.
« -Velvet… Qu’est-ce que tu fais ? »
Sans broncher, je continue de le tenir en joue.
« -Je viens juste récupérer l’argent que tu as mis de côté pour mon pot de départ. »
Mon ex-employeur n’a en rien l’air ravi. Que je surgisse ainsi dans son bureau pour le menacer d’une arme ne lui plaît clairement pas, d’autant que le contexte est déjà plutôt chaotique à l’extérieur.
« -Putain, Velvet, tu crois que c’est le moment ? Que… Qu’est-ce que tu fous avec ça, au juste ?! »
Je hausse les sourcils.
« -Quand on ne peut même pas compter sur son patron pour se protéger, on prend des précautions. Maintenant, file-moi toute la thune dont tu disposes, et je te jure de disparaître à tout jamais de ton foutu club. Comme tu le désirais. »
Il serre les dents.
« -Tu comptes profiter de tout ce bordel pour te tailler en douce ? Et tu penses vraiment pouvoir t’en tirer comme ça ?! »
Un coup de feu retentit.
La balle siffle à côté de lui, et se loge dans le mur derrière.
« -PUTAIN ! »
Il sursaute, et attrape aussitôt après un trousseau de clé posé sur la table. Il me le lance, et je le réceptionne de ma main de libre.
« -Les bénéfices de la soirée d’hier sont dans ma caisse. Maintenant tire toi avec et VA CREVER.
-N’y compte pas trop. »
Je me rapproche de lui et lui mets mon poing dans la tronche. Il tombe au sol, et je le surplombe de toute ma hauteur.
« -Si je fais ça, c’est toujours pour la même et unique chose. Survivre. »
Et je l’assomme.
***
Ensuite, je me suis dirigée vers l’est.
Sans discontinuer. Sans objectif précis.
J’ai simplement roulé. Roulé, roulé, encore roulé, et roulé indéfiniment.
J’abandonne derrière moi une vie de débauche et de déboires.
Mais au profit de quoi ?
Je l’ignore.
Peut-être aurai-je une réponse demain.
Now
début
Jusqu'à maintenant, qu'est ce que ton personnage a accompli ?
Rien. Elle n'existe même pas aux yeux de la loi, et a passé sa vie dans l'ombre, entre trafic de drogue et débauche.
Quelle renommée ton personnage a-t-il ?
Elle était plutôt connue dans certains cercles privés de sa ville natale, mais est parfaitement anonyme au reste du monde.
A quel point ton personnage maitrise-t-il son alter ?
Ça va. C'pas non plus un alter qui demande une maîtrise de ouf guedin.
Fiche d'alter !
Quel équipement possède-t-il ?
Elle est à poil. Genre, presque littéralement, en fait. La fourrure qui recouvre son bassin fait qu'elle se contente de porter un haut.
Quelles expériences marquantes a-t-il vécu ?
Elle a grandi dans la rue puis a longtemps été escort girl.
Quelles sont les aspirations de ton personnage ?
Pouvoir se poser, et avoir une vie plus décente.